Intercept ›› pride

L'allée principale était encore quasiment vide, et la rosée matinale gouttait lentement des plantes bordant la rue.
Adossée à l'obmre d'un renfoncement sur la triste façade grisâtre d'un gratte-ciel, Atlas jetait de temps à autres des coups d’œil désintéressés à travers la vitrine du magasin lui faisant face. La vitre étrangement propre y laissait entrevoir une horloge digitale fixée au dessus d'un bureau d'accueil miteux. Il faudrait encore une quinzaine de minute pour que la cible du jour pointe son nez.

Le travail était simple, sans encombre, la cible qualifiée de « non dangereuse ». L'alien ne savait rien de celui dont elle devait écourter les jours dans l'heure qui suivait, si ce n'est une rapide description physique, qu'il était fonctionnaire dans le bâtiment auquel elle faisait dos et qu'il arrivait systématiquement deux minutes après l'officiel début de la journée de travail.
Connaissant encore assez mal ce quartier – très fréquenté, donc assez délicat en tant que scène de crime, Atlas s'était levée aux aurores pour cerner le lieu de travail de sa « proie ». Elle réfléchissait encore à comment s'y prendre – un égorgement serait quelque peu mal placé ici. Elle ne s'était donc pas encombrée d'armes de destruction massive, si ce n'est une capsule de poison à effet rapide, son éternel couteau papillon à lame thermique et un petit pistolet silencieux bien que mortel camouflé dans une poche de son sweat.

Un casque aux couleurs sombres ne diffusant pas de musique enfoncé sur la tête, les mains vissées dans les poches, la demoiselle attendait donc patiemment que 09:02 apparaisse sur l'affichage rouge vif en face d'elle.
Les premier salariés arrivèrent d'un coup d'un seul dix minutes avant l'horaire escompté, s'entassant non loin d'elle pour fumer en racontant des péripéties enjolivées à propos de leurs familles respectives. Après quelques minutes qui semblèrent interminables à l'assassin qui les lorgnait, le groupe se dissout progressivement et entra par les portes automatisées, laissant derrière lui quelques mégots dont la brise matinale amena l'indélicate odeur jusqu'à Atlas.

Elle joua avec le fil de son casque. Le silence revint tranquillement.

Elle attendrait qu'il grimpe dans l'ascenseur pour lui asséner un coup de couteau propre et efficace dans le creux de la nuque, hors du champ de vision de la seule et unique caméra de surveillance présente au rez-de-chaussée qui n'était autre que celle de l'élévateur en question. Le bâtiment était tellement peu sécurisé – l'entreprise dont la rousse avait déjà oublié le nom n'était pas des plus fortunées – que l'assassinat s'annonçait comme un jeu d'enfant. La rue était toujours quasiment déserte, les rares fonctionnaires lobotomisés alentours ne prêtaient attention qu'à leur montre en pressant le pas, les yeux rivés sur les trottoirs et le col de la chemise déjà trempé de sueur, avant de disparaître dans leurs buildings respectifs.

L’affichage digital annonça 09:01.

mine

Anodin bâillement doucement réprimé, tes lèvres ayant fini de se mouvoir sous cette étoffe de tissu qui choyait ton visage t'offrant une chose rare aujourd'hui en notre société, l'anonymat. Tu te tenais là, en haut de cette bâtisse épiant en un total désintérêt les quelques individus en contrebas, tu te contentais d'attendre tout bonnement une chose, un événement précis pour lequel tu avais été payé. Ta tact pianotait encore et encore le long de l'acier d'une arme à feu en guise de témoignage d'une certaine impatience, désireux sans doute d'exercer ce travail le plus rapidement possible et sans bavure pour certainement par la suite profiter de ta journée. Tes pupilles ne cessaient de se mouvoir à la recherche d'une quelconque information, du visage de ta victime alors que l'heure avançait doucement mais sûrement. Tu éprouvais peut être une certaine pitié vis à vis de ces divers individus qui se dirigeaient un à un vers le siège de leur entreprise dans le sens où leur vie ne devait être des plus passionnantes, chaque jour n'étant qu'un éternel recommencement pour souvent un salaire peu enviable en certains cas. Tout ceci était si ironique, tu allais offrir un certain rebondissement en la vie de l'un d'eux mais non pas forcément celui qu'il désirerait.

Ta curiosité n'avait cependant tardé à être anormalement piqué par un comme un imprévu, une chose inhabituelle ou plutôt unique en un tel paysage si le terme pouvait convenir. Ton regard ne cessait ainsi de vagabonder le long de cette silhouette, auprès des courbes de cette jeune femme relativement étrangère à cette place. Tu te demandais ce qu'elle attendait là où elle ne semblait être une employé de ce bureau en lequel s'engouffraient quelques personnes. Curieux à souhait sans doute tandis que tu te devais de simplement accomplir ta mission d'assassinat après tout la présence de cette personne en ces lieux ne devait être qu'un simple hasard, qu'un simple facteur qui ne devrait te gêner en aucun point, un simple futur témoin ni plus ni moins. Après tout cela n'était pas la première fois que tu allais ôter la vie à un quelconque être et cela n'allait être la dernière, on finissait tous par mourir un jour où l'autre alors autant que ceci puisse te profite. Les secondes s'écoulant donc inexorablement encore et encore, ta proie avait donc fini par se profiler, toujours quelque peu en retard comme l'on te l'avait dit, le divertissement de cette matinée allait donc pouvoir bientôt commencer pour ton plus grand plaisir.

Un simple sifflement avait donc fini par fendre l'air alors qu'une légère fumée émanait de ton fusil, le trottoir qu'il profanait de sa présence n'ayant tardé par se nimber d'un pourpre typique à un être de chaire et de sang. Son hémoglobine se rependant, s'extirpant de son corps ou plutôt de son crâne fâcheusement amoché par le projectile qui l'avait heurté, tu venais d'accomplir sans le moindre doute la tâche la plus facile de ton contrat maintenant encore fallait il que tu arrives à t'échapper du centre ville sans tomber nez à nez avec une quelconque police. Ton arme reprenant place en ton dos alors que tu finis par t'élancer dans le vide, quittant ce toit afin de retrouver le sol, ton pouvoir ayant fait son œuvre afin de t'assurer une chute indolore. Il te fallait d'ores et déjà arpenter les diverses ruelles du centre afin d'imposer le moins de regards possible alors que la foule d'au par avant semblait encore quelque peu sous le choc pour certains. Tu te contentais de courir évitant au mieux les rues plus populaires en quelque sorte tandis que tu espérais ne pas tomber sur un quelconque imprévu en ta fuite, sur une quelconque personne qui aurait pu te remarquer, deux assassinat en un jour, tu n'avais pas vraiment envie de procéder ainsi.

Les chiffres rouges se mouvèrent, et 09:02 s'afficha sur l'horloge digitale.

Atlas releva la tête, l'oeil vif, et joua de son couteau dans sa poche, faisant glisser ses doigts sur le pommeau ignifuge. Pour une raison qui lui échappait, elle était tout à coup mal à l'aise, et son instinct – qui la trompait rarement – lui criait qu'elle n'était pas toute seule. Pourtant, elle avait bien observé partout où un éventuel témoin aurait pu être présent... Ce n'est pas comme si elle était négligente.
La cible surgit tout à coup, chassant ses pensées annexes. L'homme arrivant d'une ruelle en face avait les yeux rivés sur son téléphone portable, et se dirigeait d'une marche nonchalante vers l'entrée.

Atlas ne devait pas louper son occasion, la situation annonçait un travail facile, mais avec un timing bien précis. Elle dégaina son arme, le poing serré, et sortit de l'ombre protectrice du petit renfoncement. La lame du couteau brilla entre sa main et sa poche alors qu'elle saisit le pommeau d'une main assurée.

Un pas en avant, et une détonation sifflée bien que sonore de par son écho entre les grands immeubles retentit. En une fraction de seconde, la jeune femmes bondit en arrière et son dos heurta le béton froid. Collée au mur, elle évalua alors la situation : sur sa droite, elle aperçut la trainée de sang chaud qui dégoulinait lentement du trottoir. On venait de la doubler sur son propre assassinat.
Ni une ni deux, elle leva les yeux vers l'endroit d'où elle avait entendu le tir étouffé partir. Elle scruta un moment les hauteurs de la rue, avant d'apercevoir le tireur. Elle ne distingua que sa silhouette, ce dernier se mettant en mouvement dans l'instant avec des gestes trahissant son expérience, son arme – un imposant fusil sur le dos. L'alien se demanda un instant s'il fallait qu'elle monte voir qui était-il ou s'il était plus prudent de rester cachée, même s'il était évident que l'inconnu l'avait pourtant vue de son perchoir. Pourquoi l'avait-il épargnée, elle qui avait témoigné de la scène aux premières loges ?
Elle n'eut guère le temps de réfléchir plus, puisque l'auteur du crime... Bondit. Dans le vide. Pour se réceptionner un court instant après sur ses deux jambes comme si de rien n'était. Plutôt surprenant.
Mais Atlas en avait vu bien d'autres – et non seulement on lui avait pris -sa- cible, mais en plus l'auteur du tir avait eu l'audace de le faire devant elle. Il devait avoir ses raisons, mais Atlas ne pouvait pas rentrer bredouille. Fourrant hâtivement son couteau dans sa poche à nouveau, elle remonta ses manches, l'adrénaline lui réchauffant les muscles, et s'élanca à grandes enjambées à la poursuite de l'inconnu.

Rapide et silencieuse, la rousse ne tarda pas à poser son regard sur la figure lointaine de son voleur de cible au bout d'une ruelle. Il bifurqua, et elle le perdit de nouveau de vue, accélérant sa course pour combler la distance qui les séparait. Il semblait au moins aussi agile qu'elle, et s'essouffler ne semblait pas être dans ses intentions. Il n'était vraisemblablement pas humain, ou tout du moins pas un humain normal.
Un petit moment après avoir grignoté quelques mètres, Atlas profita d'une rue étroite mais dégagée et déserte pour passer à la vitesse supérieure. Elle avait de l'expérience, mais l'endurance sur une course pareille lui faisait défaut. Elle ralentit avant de s'arrêter progressivement, le souffle court, et se hâta pour dégainer son pistolet compact. Elle rajusta le silencieux, visa rapidement, retint sa respiration, écarta les pieds et plia légèrement les genoux pour amortir le recul et pressa la détente. La balle aérodynamique constituée de métaux précieux et provenant d'une arme aussi moderne ne pouvait pas définitivement pas louper son probable futur hôte, au même titre que l'intéressé avait percé un trou dans le crâne de /sa/ cible.

mine

Cœur tambourinant un peu plus en ton thorax en chaque seconde, celui-ci se permettant d'un peu plus drainer cette substance qui satisfaisait ton organisme face à l'effort. Ton souffle se faisant quand à lui bien plus bestial, cela n'avait pas pour autant empêché à ton ouïe de distinguer une étrange sonorité en ton dos non loin de toi même si tu semblais un tant soit peu la distancer. Il ne t'avait fallu que quelques instants pour constater qu'une personne t'avait pris en chasse depuis quelques dizaines de secondes. Sans doute un membre des forces de l'ordre ou tout autre représentant d'une pseudo autorité, ce n'est pas pour autant que tu comptais t’arrêté loin de là cette idée. S'il était humain tu allais aisément le distancer de par l'avantage que pouvait te conférer ton pouvoir, tes gênes de lyme mais seulement si après tout... Le temps s'écoulant inexorablement en chacun de tes gestes, tu avais fini par être attisé par le simple fait que malgré tout tu pouvais encore entendre les pas d'un autre être en ton dos qui devait finalement ne rien avoir d'humain tout comme toi. Tu avais dès lors fini par entrevoir l'hypothèse que tu allais devoir te débarrasser de cette personne bien trop perfectionniste et peu enclin à l'idée de laisser un témoin vivant.

Voilà qu'un léger sifflement finit par se laisser ouïr, une seconde se profilant alors que la douleur se manifesta en ton être. Omoplate perforée mais si la balle n'avait pas quitté ton corps de par son faible calibre, tu t'arrêtas net alors quelque peu déstabilisé tandis que l'hémoglobine entamait sa lente chute de ta blessure. Tu avais doucement grogné en ce premier instant là où ton pouvoir repris dès lors le dessus face à ce désagrément. Ton sang se permettait d'ores et déjà de grignoter l'alliage en lequel étais confectionné le projectile, le rongeant comme le ferait de l'acide avec un être de chair et de sang. Liquide pourpre finissant par la suite par se cristalliser auprès du trou béant qu'avait fait naître cette balle d'autrefois, voilà que de la chair, de la peau et un bout d'ossature finirent par naître de ce qui était manquant en ton enveloppe charnelle. Guérison non pas instantanée mais relativement rapide face à la nécessité, tu n'avais plus le moindre doute sur les intentions de cette personne qui te poursuivait depuis déjà un bon moment et de même tu n'avais plus de doute sur l'aptitude à adopter même s'il te restait encore à évaluer ta riposte face à l'acte quelque peu déplacé de ton traqueur.

Ta main se perdant le long de ton buste afin d'extraire de son fourreau l'un de tes couteaux, tu te retournas brutalement te précipitant sans attendre vers ta cible. Bref instant d'analyse alors que tu avais constaté que cet individu n'était autre que la femme que tu avais pu entrevoir sur la scène de ton crime, tu la plaquas sans ménagement au mur le plus proche ta lame venant se loger non pas sans habilité le long de sa gorge, bien trop prêt de sa jugulaire. Prêt à couper celle-ci afin de nimber son derme opale de l'hémoglobine qui gangrenait ses veines, autant dire que tu avais la main généreuse lorsqu'il s'agissait de se débarrasser d'une personne. Tes pupilles s'attisèrent un peu plus tandis que tu la dévisageais à vrai dire elle n'avait rien d'un quelconque policier ou agent. Il était peut être temps de tirer les choses au clair.

« - Bon je te laisse quelques secondes pour t'expliquer avant de me débarrasser de toi, j'espère que tu avais une bonne raison de me poursuivre et surtout d'en venir à vouloir m'abattre. »