Une brise de vent te traverse les cheveux l’espace d’un instant. Suivant le cours du vent, tu lèves délicatement la tête en te laissant entrainer là où nature t’emportais. Tu aimais cette sensation et la douce respiration de ce courant nouveau. Tu avais l’impression d’être une feuille qui se laissait aller au gré du vent. Ce genre de thérapie te permettait d’avoir l’impression de faire le vide. Tu délaissais tout ce qui était humain et cessait de penser pour ne devenir qu’un objet dénué d’intérêt. Cette soudaine rupture avec le monde réel te permettait ainsi d’être là où tu avais toujours voulu être : dans des lieux inexplorés et aucunement influencés par ton vécu.
-Grr…
Malheureusement, tu n’étais ni une feuille, ni un objet. Tu étais Accel et tu avais faim. Ton ventre venait de te ramener à l’ordre en s’exprimant verbalement devant tout le monde. Au moins, personne n’avait remarqué. Du moins, personne si tu ignorais la vieille femme à tes côtés qui te regardaient étrangement depuis que tu t’étais mis n’a baladé ta tête de droite à gauche comme un somnambule. Bref, ce n’était plus le temps de penser aux milliers de regards qui te regardaient tous de la même manière. En ce moment, ton ventre te disait qu’il avait faim et tu devais le nourrir de peur qu’il ne te dévore lui-même.
-Hmm
Deux restaurants côte à côte s’offrent à toi. Dans l’un, il y a beaucoup de gens, mais la gastronomie est réputée pour être idéale. Dans l’autre, il n’y a pas autant de gens et la nourriture n’est pas aussi bonne. Toutefois, l’ambiance y est agréable et personne ne vient déranger les gens. C’était parfait pour quelqu’un de mystérieux et subtil comme toi. Sinon, c’était le genre de lieu dans lequel les agents de bureau venaient manger. Bref, tu pénètres le sanctuaire qui risquait de t’apporter de la nourriture. Comme d’habitude, un serveur vient t’aborder pour te demander combien de places tu veux. Tu lui répondrais bien trois puisque tu manges pour trois personnes, sauf que tu étais seul. Triste – du moins, pas pour longtemps. En fait, les gens auraient dû te surnommer Paradoxe. Contrairement à ton désir premier d’être seul, tu venais de demander au serveur de te placer à la table d’une jeune femme à la chevelure blanche. Depuis ton arrivée, parmi les nombreux plats qu’il y avait, ton œil s’était figé sur elle pour des raisons que tu voulais découvrir.
-Bonjour, mon nom est Accel. Comme il n’y avait plus de place, le serveur a dû me placer en compagnie d’une personne seule.
Le serveur te regarde d’un air étrange. On aurait dit que tu venais de lui annoncer avoir tué le chat qu’il avait perdu lorsqu’il était plus jeune. Encore pire, un bruit de criquet semble envahir la salle alors qu’aux alentours, il y a des tonnes de tables libres.
-Désolé de cet inconvénient, j’espère que ma présence ne vous importune pas.
Tu ne lui sers pas la main. Ce n’était pas une bonne idée vu la luxure et la richesse des vêtements qu’elle portait. Cette femme devait indéniablement avoir un poste assez élevé. Vu la manière et l’élégance dont elle disposait de ses moindres faits et gestes, tu pouvais pressentir qu’elle était une caste au-dessus de la tienne. Ce faisant, lui serrer la main et prendre le risque de lui montrer une partie de tes tatouages n’était pas la manière idéale pour faire bonne impression. Du moins, pas avant de savoir quel type de personnalité elle avait. Si elle n’était pas intéressante, tu risquais de te lever et de partir sans demander ton reste ni même son nom.
-Mais bon, qu’est qu’une femme aussi élégante que vous vient faire dans un restaurant du genre?
Andy. Assise à ta table, les cheveux relevés en chignon fouillis, tes yeux rivés sur ce qui ressemble à une tablette. Ton travail, ta vie. Tu fais défiler machinalement les mots, les documents, tu lis à une vitesse impressionnante. Andy, ton repas est en train de refroidir. Mais au fond, t'en as rien à foutre de la bouffe, t'es juste là parce que t'avais envie de sortir du bureau. Alors à quoi bon travailler encore ? T'en sais rien, c'est juste qu'il faut le faire. T'es obligée. Et y a ce type qui s'approche et qui commence à parler. Il te sort de ta réflexion, t'aime pas ça. Tu trouves ça malpoli.
▬ Bonjour, mon nom est Accel. Comme il n’y avait plus de place, le serveur a dû me placer en compagnie d’une personne seule.- Tu relèves les yeux, machinalement, tu fais le tour de la salle. T'es blasée. - Désolé de cet inconvénient, j’espère que ma présence ne vous importune pas.
Tes yeux luisent, kaléidoscope de couleurs inhabituelles. T'ouvres même pas la bouche, ça sert à rien. Il a décidé qu'il allait s’asseoir là, alors à quoi bon lui répondre. Il a l'air de se ficher totalement du fait qu'il n'est pas le bienvenu, malgré ce qu'il dit, malgré ce que t'en pense. Tu soupires juste un peu, replaces une mèche de tes cheveux.
▬ Mais bon, qu’est qu’une femme aussi élégante que vous vient faire dans un restaurant du genre?
Tu souris un peu en entendant le compliment noyé dans ses paroles. Il parle trop, c'est un fait. Tu fermes ton esprit aux pensées des gens autour. Y a trop de brouhaha, même avec si peu de personne dans la salle. T'as juste le temps de capter l'incrédulité du serveur et son agacement évident. Ça te fait sourire. J'espère qu'il ne croit pas que je souris pour lui.
▬ Je viens manger.
Logique. Implacable. Et pourtant, t'as pas l'air d'avoir touché à ton assiette.
▬ Et vous, vous venez ici pour manger ou pour aborder les élégantes inconnues qui mangent ?
Tu croises tes mains sur la table et t'attends, en fixant l'inconnu, un petit sourire sur tes lèvres.
Si tu t’étais fié à la première réaction qu’elle avait eue en te voyant, tu serais tout simplement parti sans demander ton reste. Tu aurais d’ailleurs manqué la chance d’assister à ce délicieux sourire qu’elle était en train de te servir. Semblerait-il que les prochains événements risquaient d’être assez intéressants? Qui plus, elle semblait bien vouloir se prêter au jeu. D’habitude, tu avais déjà pris la gifle ou tu l’avais déjà esquivé. M’enfin, d’habitude, tu l’esquivais, mais par moment, tu te laissais faire rien que pour te souvenir de la douleur que représentait ce geste. Or, aujourd’hui était un jour nouveau. Aussi hautain semblait-elle être, elle faisait preuve d’une grande ouverture, ce que tu appréciais particulièrement. Malheureusement, tu restais sur tes gardes. En effet, il était rare que quelqu’un agisse de manière si accueillante sans savoir une idée derrière la tête ou l’objectif d’évaluer l’objet de son attraction. Dans tous les cas, tu comptais te prêter au jeu, car toi aussi tu voulais savoir qui elle était.
-Non, ça ne m’arrive que lorsque je vois une élégante inconnue qui mange seule et qui dégage quelque chose de spécial?
Tu arques un sourcil pour lui faire comprendre que tu lui posais une question. De nature peu bavarde, tu préférais y aller avec des expressions pour t’exprimer. Ainsi, ça t’empêchait de paraître lourd et bavard comme tu en avais eu l’air en l’abordant.
-Ensuite, c’est à vous de me faire comprendre ce qui m’a attiré vers vous. Vous êtes certainement jolie, mais derrière ce sourire, il doit bien se cacher quelque chose d’intéressant non?
Tu ne draguais surtout pas. Du moins, pour toi ce n’était pas le cas, mais pour le commun des mortels, tu étais carrément en train de te lancer dans une séance de drague. En plus, tu inversais les règles d’usage, comme quoi les mots doux passaient avant la poignée de main initiale. Or, dans ta tête, les choses ne se passaient pas ainsi. En fait, outre le fait que tu sois fou, tu n’accordais qu’une poignée de main que lorsque tu en voyais l’intérêt. Là où tu venais, une vulgaire poignée de main était suffisante pour que l’adversaire prenne contrôle de vos moyens. Ainsi, tu ne pouvais pas accorder ta main sans te soucier des dangers qui l’entoureraient. C’est pour cette même raison que tu avais fait une vérification d’usage pour voir si le danger en valait la peine. Une fois rassuré, tu étais prêt à te risquer dans cette conversation. Tu voulais à tout prix comprendre si ce sourire cachait malice ou affection. Avec un peu de chance, ce serait un mélange des deux, mais pour ça, il fallait au moins que tu oses te présenter.
-Mon nom Blaze pour le moment. Dépendant le déroulement du repas, il se transformera peut-être en «Monsieur Blaze Smith » ou enfoiré. Ce sera à votre choix. Pour ma part, j’aimerais bien savoir à qui j’ai affaire.
Tu jouais cartes sur table , prenant même le risque d’avancer ta main pour prendre la sienne. Tout semblait normal, si ce n’était de ce sourire malicieux que tu avais en coin. Quelque chose en toi n’inspirait pas confiance. Était-ce parce que tu venais déjà de cerner à qui tu avais affaire? Mystère et boule de gomme.
▬ Non, ça ne m’arrive que lorsque je vois une élégante inconnue qui mange seule et qui dégage quelque chose de spécial? Ensuite, c’est à vous de me faire comprendre ce qui m’a attiré vers vous. Vous êtes certainement jolie, mais derrière ce sourire, il doit bien se cacher quelque chose d’intéressant non?
Ah Andy. Tu regrettes déjà d'avoir souri. De ne pas avoir dit non tout de suite T'avoues, t'étais un peu curieuse. Mais les humains, pouah ce qu'ils peuvent être lourd des fois. Tu renifles une odeur particulière. Il sent l'alien, il sent l'humain. Un metis ? Hm. On dirait que son côté humain prime sur le reste. Tu fermes les yeux, agacée par tant de blablas. Pourquoi ne pas aller droit au but et puis, c'est quoi cette façon de parler d'un autre millénaire ?
▬ Mon nom Blaze pour le moment. Dépendant le déroulement du repas, il se transformera peut-être en «Monsieur Blaze Smith » ou enfoiré. Ce sera à votre choix. Pour ma part, j’aimerais bien savoir à qui j’ai affaire.
Tu l'observes des tes yeux étranges, tu penches la tête, il est comme un spécimen d'une espèce bizarre que tu serais venue admirer dans un zoo. Tu souris vaguement, par gentillesse, par pitié. Il pue ce type. Tes sens de Rizzen te mettent à mal alors que t'essaie de te cacher dans ta serviette pour prendre une inspiration.
▬ En fait, vous n'allez pas manger avec moi. J'ai le nez capricieux en ce moment et il y a une odeur sur vous qui me dérange. - tu regardes la main avec dédain, sans rien faire d'autre que froncer tes narines – Et si vous pouviez vous mettre de l'autre côté de la salle, ce serait très aimable.
Tu te recules, Andy, sur ta chaise, l'air désolé. Mais c'est vrai que t'as du mal en ce moment, avec tous les autres autour. Ils sentent forts, parlent forts, pensent bien trop fort. Tu captes une bribes des pensées de l'homme en face de toi. Tu trouves ça con. Il est fêlé en fait. Tu fais un petit geste de la main, en lui demandant de se pousser. Recule s'il te plaît.
Un sourire se trace sur ton visage alors que tu te retrouves carrément outré par la manière dont elle agit. On aurait dit que tu étais un déchet, un objet non désirable dans la salle. Dans toute ta vie, tu avais vu des gens se prendre des râteaux. Toi-même, tu t’étais vu te faire refuser tes avances, mais tu n’avais jamais rien vu de tel. Elle venait carrément de t’humilier auprès de ceux qui avaient assisté à la scène. D’ailleurs, tu pouvais déjà entendre le serveur rire intérieurement , connard.. Dans tous les cas, tu es renversé par la situation, aussi bien que tu ne savais pas où mettre ta main. Tu te contentes donc de la ramener à ton visage pour venir prendre ton menton. Tu étais perplexe et tu avais besoin de soutien pour penser et éviter d’exploser.
«Il y a quelques années, je t’aurais déjà tranché la tête»
Tu te surprends à avoir des intentions meurtrières alors qu’un sourire un peu fourbe commence à s’emparer de tes lèvres. Malgré tout, tu devais te calmer et résister à l’impulsion qui commençait à prendre possession de ton corps. Tu savais que tu étais en mesure de tuer sans problème, mais tu devais cesser de voir le meurtre comme une solution à toute chose. Surtout qu’en ce moment, elle ne t’avait rien fait outre t’insulter et te ridiculiser. Ce n’était rien de grave non? Si c’était grave!
-Je pense plutôt que c’est votre attitude qui vous intoxique.
Tu lui retournes une parole salée, chose que tu n’as pas vraiment l’habitude de faire. Par contre, pour certaines raisons, elle te fait carrément sortir de tes gonds. Plus tu la regardes et plus elle se transforme en vilaine sorcière que tu as envie d’exploser. Mais bon, tu devais te mettre à sa place. Elle devait être une extraterrestre à l’odorat ridiculement fin. Ainsi, elle était en mesure de respirer ton odeur et celle des autres. Sur le coup, tu commences à chercher à quel type d’extraterrestre ce type de caractéristiques convenait. Les choix qui s’offraient à toi étaient courts.
«C’est peut-être une krarn, et si c’est le cas, je vais lui trancher la tête. Mais non, ça dois être une rizzen, mais elle me semble trop conne pour être une rizzen».
Elle ne pouvait pas être une Rizzen. Ce devait être une humaine qui se pensait au-dessus de tout , rien de plus. Rien que par la manière dont elle agissait, tu pouvais sentir le côté superficiel qu’elle avait en elle. De plus, tu savais avec pertinence que ton odeur n’était pas déplaisante. Pour avoir eu droit à de nombreuses attaques d’aliens vicieux comme les Erog , tu savais que tu devais avoir bon goût. La seule et unique fois qu’une Erog avait pu se nourrir de toi, celle-ci t’avait dit que tu sentais la muscade ce qui n'était pas mal. Alors, quel était son problème?
«Du calme…non mais toi ta gueule. »
Bon, tu devais commencer à te calmer , car tu avais l’air fou lorsque tu te parlais à toi-même mentalement. Pire encore, si elle était une rizzen, grâce à son don de télépathique, elle risquait de lire tes délires internes.
-Mais, ce n’est pas votre faute. Je suppose que vous êtes née avec la personnalité d’un personnage de Shojo. Au début, il est donc normal que j’ai l’air d’un déchet et que vous me détestiez. Vous risquez de ne pas me supporter même si vous avez décidé de le faire de manière assez originale. Par contre, vous savez comme moi comment ça risque de se terminer.
Ton visage et tes traits s’apaisent alors que tu te recules gentiment vers l’arrière. Reprenant ainsi tes sens, tu commences à reprendre ton calme et le contrôle de la situation. Sur le coup, tu penses à quitter, mais tu ne préfères pas reculer sans avoir demandé ton reste. Ainsi, tu décides de passer à la contre-attaque. Par contre, tu t'en tiens aux règles d'usage en cédant la place aux dames d'abord. Tu avais déjà fini ton tour de toute manière.
Elle entend tout, toutes ses pensées, ressent sa haine soudaine et sa colère. Et elle a du mal à comprendre, elle l'avoue. Parce que sa réaction est purement physique, parce qu'il y a réellement quelque chose qui l'incommode. Qu'en ce moment, c'est pas la joie des sens, que tout déraille. Mais lui, lui l'a mal prit, elle l'entend, elle le ressent. Et elle a du mal, du mal à se mettre à sa place. Parce qu'elle ne voit pas l'offense, elle n'en a pas conscience.
▬ Je pense plutôt que c’est votre attitude qui vous intoxique.
Andy ferme les yeux, visiblement malade. Son teint est pass de clair à cadavérique. Et ses yeux commencent à pleurer seuls. Les pensées qui tournoient dans sa tête lui explose le crâne, elle a envie de sortir dehors.
Mais, déboussolée, elle arrive juste à se cogner la tête contre le mur derrière.
▬ Mais, ce n’est pas votre faute. Je suppose que vous êtes née avec la personnalité d’un personnage de Shojo. Au début, il est donc normal que j’ai l’air d’un déchet et que vous me détestiez. Vous risquez de ne pas me supporter même si vous avez décidé de le faire de manière assez originale. Par contre, vous savez comme moi comment ça risque de se terminer.
Andy secoue la tête, assommée. L'incompréhension qui l'étreint devient de plus en plus grande. Ces humains, quelles drôles de créatures. Elle ne les comprend pas toujours, comme maintenant. Mais elle aurait aimé en être un, au moins à moitié. Pour se sentir moins décalée dans ce monde.
▬ Sho-jo ? Je ne - un haut-le-coeur, elle risque de vomir incessamment sous peu - comprend pas. Vous n'êtes pas un déc-het. J'ai des prob-lèmes de dérèg-g-lement sen-sen-soriel en ce moment.
Elle écrase sa main contre son nez et sa bouche et se lève brusquement. Pour finir par se décaler de cinq bon mètres.
▬ Vous êtes au moins à moitié humain pour penser de cette manière..
Elle souffre. Son visage est trempé par la sueur. Mais peu à peu, tout se calme. Ça vient puis ça repart. C'est son fardeau. Elle soupire.
Tu arques un sourcil, te demandant pourquoi elle joue soudainement la victime. À croire qu’elle devait penser que tu risquais de la prendre en pitié et elle avait bien raison. Au début, tu te serais contenté de la regarder se tortiller comme une dingue, mais lorsque tu la vois s’écarter de manière étrange, tu en viens à la conclusion qu’elle est 100% alien. Ainsi, elle n’exagérait pas en te traitant de déchet, ce devait vraiment être un dérèglement sensoriel. Pour une fois, tu rencontrais quelqu’un qui pouvait admettre que le problème venait d’elle et non de toi. Ça te rassurait et te poussait à vouloir l’aider, mais de quelle manière? Huhu, tu avais la solution à tout, évidemment.
-Je suppose que m’approcher de vous n’aidera pas, mais j’ai une idée.
Tu appelles le serveur d’urgence en le fusillant du regard. Comme un vrai connard, il était resté là à vous observer en attendant le bon moment. Ce détracteur insignifiant n’attendait que le bon moment de te foutre dehors. C’est d’ailleurs pour cette même raison qu’il était arrivé à une vitesse exemplaire. Il devait croire que tu allais lui demander de partir, mais au contraire. Tu comptais l’expédier dans sa cuisine à coups de pied aux fesses ouais.
-Amenez-moi un pot de café et quand je dis café, ne le préparez pas, amenez-moi simplement les grains je vous prie et rapidement…
Tu lui envoies un regard meurtrier sans oublier un sourire pour qu’il puisse ressentir tes intentions. Dès lors, tu le vois repartir et arriver à la vitesse de l’éclair. Il bégaye quelques paroles pour te dire que ta demande était arrivée, mais tu ne l’écoutes pas. Tu te contentes de le remercier en te disant que tu devrais lui donner un pourboire afin qu’il aille prendre des cours de dictions.
-On va essayer un truc d’accord? Il y a deux possibilités. Il y a la chance que ton dérèglement se calme et celle qui ne fera que rendre la situation pire qu’elle ne l’est. Dans les deux cas, ça aidera à masquer mon odeur d’humain qui vient te chercher parce que d’un côté, ça éteindra la force de ton olfaction et de l’autre, tu risques de t’évanouir.
Tu agrémentes le mystère à l’aide d’un rictus carnassier et ridiculement sarcastique. Bon, tu devais admettre que tu avais hâte qu’elle tente l’expérience.
-Prête?
Tu ne prends pas le temps de lui laisser donner son approbation. Tu te lèves et t’approches dangereusement d’elle en ouvrant le pot de café. Par ton expérience, tu savais que dans les parfumeries, ils poussaient souvent les gens à sentir du café entre chaque parfum pour neutraliser les nerfs olfactifs et la présence des parfums qui venaient d’être inspirés. Ainsi, tu allais pouvoir confirmer ton expérience sur une Rizzen.
-Ah et au cas où vous auriez oublié, mon nom est Blaze. Ce n’est qu’au cas où ça tournerait …mal?
Tu marmonnes la dernière partie de la phrase avant de te retrouver à une distance d’un demi-mètre d’elle. Les effets n’allaient pas tarder à donner leur verdict.
Elle se tient la tête entre les mains parce que ça cogne là-haut. Son ouïe déraille à son tour et elle finit par se retrouver coupé totalement du monde sonore. Ne lui reste que ses yeux, son toucher. Parce que l'odeur est insupportable, parce qu'elle n'entend plus rien. Elle tente tant bien que mal de lire sur les lèvres de Blaze mais il parle trop et trop vite. Et elle a bien trop mal au crâne. Elle ne peut qu'observer, impuissante, ses fais et gestes. La télépathie fait des siennes elle aussi. Ça semble durer un temps fou.
Soudain, elle se retrouve totalement piégée, plus rien ne la relie au monde extérieur. Ses yeux, son nez, ses mains, ses oreilles. C'est le black-out. Il paraît que ça arrive. Ça dure juste une dizaine de secondes. Mais les dix secondes les plus longues de votre vie. Puis tout revient, dans un bruit étrange, les fils se reconnectent et la voilà nez à nez avec un pot de café. Elle respire enfin normalement et les odeurs ne l'agresse plus. Son visage reprend sa teinte de perle, son rythme cardiaque redescend peu à peu.
▬ Ce café est bon marché.
C'est tout ce qu'elle a dire. Elle finit par se rasseoir, un peu secouée et par reporter son attention sur la tablette, les dossiers, le travail. Elle occulte même Blaze, il le faut. Pour reprendre un peu pied dans la réalité. Passe ses doigts sur les pages virtuelles et reprend peu à peu le fil des choses. Dérèglement sensoriel post-puberté. Il paraît que ça arrive à 15% des Rizzen entre 20 et 25 ans. Une sale merde en gros.
▬ Vous pouvez vous rasseoir maintenant. C'est terminé jusqu'à la prochaine fois.
Une chance que ça avait fonctionné et qu' elle s’était calmée sinon... nah, il vallait mieux ne pas y penser. Toutefois, tu pouvais clairement voir que son état s’était relativement affaibli, signe que ce qu’elle avait n’était pas qu’une petite passe. Le plus drôle dans toute cette situation c’est le moment où tu avais entendu sa dernière phrase. Genre, elle pensait qu’il allait y avoir une prochaine fois. C’était hilarant à un point tel qu’intérieurement, tu ne pouvais t’empêcher de trembler.
-La prochaine fois?
Tu commences dangereusement à extérioriser ce qui commençait à posséder tes mouvements internes, te poussant à t’exclamer d’un rire exagéré. Or, ce n’était pas de ta faute si sa phrase était venue te perturber. Après tout, ce n’était pas comme si tu voulais vivre une expérience aussi désagréable une seconde fois, surtout pas pour te faire traiter de déchet ambulant qui sentait mauvais. Il fallait mettre les choses au clair.
-Je ne comprends pas.
Tu prends soin d’être confortablement posé sur ta chaise alors que tu la recules un peu au cas où ça éclaterait à nouveau. Sait-on jamais.
-Vous êtes en train de me dire qu’il y a un truc pire que les SPM et qui est presque aussi récurrent?
Tu louches d’un œil en arquant un sourcil pour lui témoigner de l'étendue de ta surprise. Intérieurement, tu te disais qu’elle devait probablement être en train de se foutre de ta gueule parce que si elle avait raison, tu ne saurais pas vraiment comment réagir outre te dire que tu aurais dû naître gai. Nah, mais l’espace d’une seconde, tu imagines comment ce peut être de vivre dans de telles conditions et tu ne peux qu'exprimer un vulgaire frisson plein d'effroi.
-Va falloir que vous m’expliquiez parce que je dois savoir si je dois commencer à courir maintenant ou pas…
Bon, tu adoptais un petit ton comique même s’il y avait un fond de vérité dans ta crainte. Tu trouvais simplement la situation assez comique et intéressante. Il ne restait plus qu’à attendre un peu plus de détails pour être en mesure de cerner cette situation qui était assez captivante.
-Je ne suis pas médecin, mais après avoir vu de nombreuses «maladies», je n’ai jamais vu un phénomène du genre…
Normal, les rizzens étaient tous morts les premiers sur l’autre planète en se faisant poignarder par leurs facultés sensitives.
Andy lève enfin ses yeux de on document, le visage figé dans une étrange expression, neutre. Incroyablement neutre. Comme si rien en ce bas monde nepouvait l'atteindre. Elle regarde l'homme, l'écoute parler. Mais ses mots glissent sur elle comme de l'eau sur les plumes d'un canard. Elle s'est lassée, le travail va bientôt reprendre, elle n'a plus le temps de le laisser parler autant. Il parle tellement. Tellement de mot qui sorte et qui se mêle dans ses oreilles. Ça agace l'Alien qui, de surcroît, entend plus ou moins involontairement une partie des pensées des gens autour. Le bruit de fond dans sa tête commence à devenir assez incomodant. Elle grimace, gigote sur sa chaise comme si quelque chose la piquait.
Elle lit sur son visage diverses émotions, entend en bruit de fond ses pensées. Ca l'exaspère, elle voudrait tout étouffer. Mais cela fait bien trop peu de temps que la crise s'est terminé, elle va devoir faire avec, encore une fois. En temps normal, Andy arrive plus ou moins à gérer correctement la télépathie... Mais tout ne peut pas marcher correctement tout le temps. N'est-ce pas.
Elle sourit légèrement, réfléchit à quelque chose. Et replonge dans son dossier pour y vérifier quelques éléments.
▬ Je ne suis pas médecin, mais après avoir vu de nombreuses «maladies», je n’ai jamais vu un phénomène du genre…
Elle attend quelques secondes et redresse la tête. Elit quelque chose et jette un coup d’œil derrière Blaze. Puis grimace légèrement, en fronçant le nez.
▬ Le mec derrière est absolument obscène.... Mais tu ne peux pas- bref. Il paraît que ça arrive. À cause d'une puberté tardive ou que sais-je, le fait est que ça arrive à une petite partie de la population Rizzen de ma tranche d'âge.
